Rapport Charges et Produits pour 2023

Publication du rapport annuel Charges et Produits 2023 : 30 propositions pour améliorer l’accès aux soins, renforcer la prévention et maîtriser les dépenses

Le Conseil de la Caisse nationale de l’Assurance Maladie (Cnam) a approuvé ce jour le rapport annuel Charges et Produits (1) : celui-ci présente 30 propositions concrètes de court, moyen et long terme pour améliorer la qualité et l’efficience du système de santé, dans un contexte inédit de crise sanitaire. Le rapport tire des enseignements de cette crise, notamment liés aux nouvelles contraintes financières, avec un déficit historique de 26 milliards d’euros en 2021. Les propositions seront remises prochainement au ministre en charge de la Santé et de la prévention, ainsi qu’au Parlement, avec l’ambition d’éclairer les débats du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) et les politiques de santé.

« Ces propositions interviennent dans une période inédite qui nécessite de profondes évolutions pour à la fois faire face aux urgences de très court terme et mieux répondre aux besoins de santé de la population. La crise sanitaire nous a appris que la santé publique et la prévention doivent occuper une place de premier plan, et les évolutions telles que la télémédecine et les nouveaux partages des tâches doivent s’accélérer. Mais tout ceci ne peut se faire sans assurer la viabilité économique de long terme du système de santé, » explique Thomas Fatôme, directeur général de la Caisse nationale de l’Assurance Maladie.

Pour faire face à cette situation exceptionnelle, le rapport annuel de la Cnam évolue : il intègre désormais un panorama global du système de santé. En complément de la cartographie médicalisée des dépenses, dont les données sont accessibles à tous depuis le 20 juin sur le site Datapathologies, deux nouveaux ensembles d’indicateurs sont désormais utilisés : une cartographie des professions de santé libérales qui révèle les grandes tendances en termes d’offre de soins (ex. : hausse du nombre de médecins spécialistes installés en secteur 2, du nombre d’infirmiers ou de masseurs-kinésithérapeutes et baisse du nombre de médecins généralistes…) et un tableau de bord de 17 indicateurs de santé publique (prévention des cancers et bucco-dentaire, couverture vaccinale grippe, HPV (2), addictions…) qui sera présenté chaque année et permettra d’en avoir une vision régulière.

Par ailleurs, le rapport Charges et Produits s’inscrit désormais dans un cadre pluriannuel par sa structure et son approche par sujets, notamment les mesures à impact financier. Il permet également de suivre dans la durée des « fils rouges », qui correspondent aux grands enjeux de l’Assurance Maladie : l’approche par pathologie, l’approche par population, l’organisation des soins et l’efficience.

Cette année, 30 propositions offrent des améliorations à apporter au système de santé, au sein de sept grands chapitres :

1. L’approche par pathologie, portant cette année sur l’insuffisance cardiaque et le diabète, confirme l’importance de la prévention et d’une prise en charge précoce pour éviter ou retarder les complications. La première proposition du rapport vise ainsi à renforcer le parcours de soins sur l’insuffisance cardiaque, notamment à travers une grande campagne de sensibilisation aux quatre signes d’alerte de cette pathologie, mais aussi via la création d’équipes de soin spécialisées couvrant l’ensemble du territoire, composées de cardiologues et d’infirmiers aux missions élargies. Quant au diabète, le rapport propose notamment de s’appuyer sur le développement des innovations numériques (suivi connecté, télésurveillance, ouverture du service Sophia en ligne…) qui permettra de rendre les patients pleinement acteurs de leur santé.

2. L’approche populationnelle qui s’engage sur le champ de la maternité et de la petite enfance ; elle met en exergue l’importance d’améliorer l’accompagnement des femmes enceintes et des jeunes mères. L’Assurance Maladie propose notamment que les sages-femmes puissent adresser des patientes à des psychologues (dispositif « MonPsy ») pour ainsi prévenir ou traiter la dépression du post-partum, insuffisamment diagnostiquée alors que fréquente chez les mères qui viennent d’accoucher. Pour les enfants de 0-6 ans, période clé de développement, l’enjeu est d’améliorer le suivi médical – pour lequel on constate de fortes disparités territoriales et sociales – et de diagnostiquer le plus tôt possible les écarts afin de les corriger d’autant mieux ; à cette fin, un repérage systématique des troubles visuels et de langage à l’école pour tous les enfants de 3 ans est proposé. Enfin, l’Assurance Maladie propose de faire de Mon Espace Santé le carnet de santé numérique de l’enfant, ce qui permettra d’accéder à des données précieuses pour déployer une politique efficace de réduction des inégalités de santé, et ce dès le plus jeune âge.

3. L’impact du Covid-19 sur le système de santé et le parcours de soins des patients est durable. Le dépistage organisé des cancers a en particulier été fortement perturbé même si un rattrapage important a été constaté en 2021 et au 1er semestre 2022 : pour améliorer le taux de participation, insuffisant en France par rapport à d’autres pays occidentaux, l’Assurance Maladie propose de structurer une démarche d’« aller vers » pour toute la population. L’amélioration du taux de vaccination HPV est une autre proposition phare du rapport : renforcement de la promotion de la vaccination auprès des adolescents, relances systématiques aux parents, nouvel indicateur de la rémunération sur objectifs de santé publique.

4. L’approche sectorielle propose cette année un focus sur la biologie médicale, dont la crise a accéléré la transformation ; il s’agit d’un secteur à la fois très concentré et en très forte croissance (chiffre d’affaire et rentabilité). Deux propositions le concernent : la définition d’une nouvelle stratégie avec de nouvelles missions pour les biologistes, ainsi que la définition d’un nouveau pacte financier avec une régulation tarifaire pluriannuelle ambitieuse.

5. La e-santé, elle aussi, connait actuellement un essor sans précédent avec un foisonnement d’innovations à soutenir mais aussi à réguler. Face à ce constat, l’Assurance Maladie propose de créer un nouveau statut pour les « thérapies digitales » ainsi que de repérer et accompagner les innovations de rupture.

6. L’amélioration de l’organisation du système de santé et le renforcement de l’accès aux soins est un des volets majeurs du rapport. Il concentre à lui-seul 11 des 30 propositions. S’agissant de l’accès financier aux soins, la proposition principale vise à diminuer, dans la continuité du 100% santé, les restes à charge de certains soins particulièrement coûteux comme l’orthodontie de l’enfant, par exemple. Quant à l’accès territorial aux soins, plusieurs leviers permettraient de réduire les inégalités en libérant du temps médical. L’Assurance Maladie propose ainsi de s’appuyer sur une boîte à outils pour améliorer l’accès à un médecin traitant : déployer plus fortement les assistants médicaux, inciter à l’installation des infirmiers en pratique avancée (IPA) en ville ou encore alléger la charge administrative des médecins. Pour lutter contre les déserts médicaux, il est également proposé d’organiser la présence de médecins spécialistes en zone sous-dense via des consultations avancées et de simplifier le contrat d’installation dans ces zones. Le rapport suggère aussi de mieux encadrer la téléconsultation et de limiter des abus, notamment en mettant fin à la prise en charge des arrêts de travail prescrits en téléconsultation en dehors de ceux prescrits par le médecin traitant. Enfin, une proposition est dédiée aux soins non programmés, ayant comme objectif de désengorger les urgences : déploiement du « Service d’accès aux soins » (SAS) dans chaque territoire et de la plateforme nationale agrégeant les créneaux médicaux disponibles, sur le modèle de « Vite ma dose ».

7. La dernière partie du rapport dédiée à l’efficience et à la pertinence des soins présente les propositions d’économies formulées dans une perspective pluriannuelle. Sur 2023, les impacts des actions de gestion du risque de l’Assurance Maladie sont estimés à 1,2 milliard d’euros. L’un des axes clés est la pertinence des prescriptions, avec une proposition qui vise à accroître la pénétration des médicaments biosimilaires, à renforcer le bon usage de l’antibiothérapie ou encore à vérifier l’authenticité des ordonnances de médicaments onéreux. Autre axe de mobilisation : la définition d’un nouveau plan d’action auprès des professionnels de santé sur la pertinence des arrêts de travail, avec la création d’un MOOC et un renforcement du contrôle des prescripteurs atypiques. Les travaux de pertinence en matière d’imagerie médicale seront par ailleurs relancés avec les représentants des radiologues, afin de limiter les examens inappropriés ou redondants. Enfin, une proposition est dédiée à la sécurisation de la facturation des professionnels de santé libéraux à l’Assurance Maladie : accompagnement des nouveaux installés, déploiement du nouvel outil d’identification automatique des anomalies et blocage a priori d’associations d’actes incompatibles

(1) Le rapport « Charges et Produits » publié chaque année permet à la Cnam de formuler des propositions concrètes d’économies pour respecter les objectifs de dépenses d’assurance maladie et garantir ainsi le maintien d’un système de santé solidaire, performant et soutenable.
Elle y énonce également des propositions complémentaires destinées à améliorer la qualité et l’efficience du système de santé.

(2) Human Papillomavirus  pour prévenir d’une exposition prolongée à une infection, source de cancer du col de l’utérus


Le rapport Charges et Produits pour 2023 est disponible sur ameli.fr
Une synthèse du rapport est également disponible sur ameli.fr