Recours à la vasectomie en France
Dans le cadre de son programme de travail dédié à la santé sexuelle des Français et leur contraception, EPI-PHARE (groupement d’intérêt scientifique en épidémiologie des produits de santé ANSM-Cnam) a réalisé une étude pour établir un état des lieux du recours à la vasectomie en France entre 2010 et 2022.
Alors que l’utilisation de la contraception féminine est en augmentation chaque année en France et dans le monde et qu’elle est de plus en plus diversifiée, les seules méthodes contraceptives masculines remboursées par l’Assurance Maladie sont les préservatifs (pour les moins de 26 ans) et la vasectomie, autorisée depuis 2001 en France.
La vasectomie est une méthode de contraception masculine définitive consistant en la section et l'occlusion des canaux déférents, ce qui empêche les spermatozoïdes de rejoindre l'urètre et, par conséquent, d'être éjaculés. Il s’agit d’une intervention chirurgicale courte (1), sans contre-indication absolue, réalisée sous anesthésie locale le plus souvent, et considérée comme sûre et efficace.
Grâce aux données du Système National des Données de Santé (SNDS), l’étude réalisée par EPI-PHARE montre que le nombre de vasectomies a fortement augmenté depuis 2010 en France, avec un taux annuel multiplié par 15 en 12 ans (de 1 940 en 2010 à 30 288 vasectomies en 2022).
Dans le même temps, le nombre de stérilisations féminines (2) a été divisé par deux entre 2013 et 2022 (de 45 138 stérilisations en 2013 à 20 325 en 2022) après une augmentation initiale entre 2010 et 2013.
Pour la première fois en France, en 2021 et 2022, il y a eu davantage de stérilisations masculines que de stérilisations féminines. En 2022, trois stérilisations masculines ont été pratiquées pour deux stérilisations féminines.
Les hommes ayant recours à la vasectomie étaient en moyenne de plus en plus jeunes entre 2010 et 2022 (de 44 à 41 ans en âge moyen), et semblaient correspondre à des profils de niveaux socioéconomiques les plus favorisés.
Rapporté à la population d’hommes de 20 à 70 ans, les Pays de la Loire et la Bretagne sont les régions où les taux de pratique de vasectomie ont été les plus élevés sur les 13 années étudiées. À l’inverse, les taux ont été nettement plus faibles en Provence-Alpes-Côte d’Azur, Hauts-de-France, Corse et en Île-de-France.
Les résultats semblent par ailleurs rassurants quant à la sûreté des procédures de vasectomie, avec notamment un recours modéré des hommes aux antalgiques dans l’année post-vasectomie (période d’étude 2010-2021). Les complications locales détectables dans le SNDS concernaient dans l’année post-vasectomie un homme sur cent, et les reprises chirurgicales étaient quasi exceptionnelles.
Enfin, le taux de recours à l’opération de réversibilité de la vasectomie, la vasovasostomie, est particulièrement faible dans les résultats de l’étude.
Cette étude nationale inédite sur une aussi longue durée montre pour la première fois en France un croisement des courbes entre stérilisations masculines et féminines, due non seulement à la forte augmentation du nombre de vasectomie en France depuis 2010, mais également à la baisse continue des stérilisations féminines, ceci pouvant en partie s’expliquer par l’arrêt de commercialisation des implants Essure® en 2017.
Ces résultats décrivent une tendance à rebours de ce qui est observé dans le monde, en particulier dans les pays anglo-saxons où la vasectomie, historiquement très répandue, connaît un déclin (États-Unis, Royaume-Uni ou Australie). La France semble progressivement combler son retard, bien que le nombre de procédures demeure encore inférieur à ceux des pays leaders en matière de contraception masculine définitive.
La surveillance du taux de procédures de vasectomie au niveau national doit donc être poursuivie afin de confirmer ou non la récente appropriation par les hommes français de cette contraception définitive. Cette étude permettra d’étudier l’impact du recours à la vasectomie dans le temps sur l’utilisation des contraceptions féminines réversibles ou définitives, et de mettre en évidence les leviers ou les freins d’accès à ces contraceptions.
(1) Pratiquée de façon croissante en chirurgie ambulatoire (99,2% en 2022)
(2) Stérilisation tubaire par ligature des trompes de 2010 à 2022, ou pose d’implants avant 2017.